Après l’album La planète impossible, Joseph
Callioni renoue avec les contrées étranges et les atmosphères de
fin du monde. Structuré en 24 chapitres, Venera
s’ouvre sur une rivière devant lequel se tient Horizon, un jeune
adolescent qui semble s’être perdu. Mais est-il vraiment égaré ?
Ou est-ce son âme qui erre au purgatoire ? Celui-ci est
amnésique et ne sait ni qui il est, ni où il est, ni pourquoi ni
comment il est arrivé là. Puis apparaît un jeune homme masqué lui
révélant qu’il a été transféré pour pouvoir implanter sa
conscience dans le monde où il a atterri, avant qu'il ne meure. Mais le Sans-Visage
disparaît sans lui fournir davantage de précisions. Horizon part
alors pour un long périple à travers des terres inconnues.
Au
chapitre suivant, changement de décor : nous sommes plongés au
sens propre comme au figuré en Amasie, une Pangée futuriste en
proie à la montée des eaux. Ce super-continent va être rapidement
submergé. Face à ce péril imminent, les Ombres éradicatrices sont
chargées de sauver en urgence l’espèce amasienne. La veille, les
métadonnées associées aux consciences des Amasiens ont été
copiées à leur insu, pendant leur sommeil. Ainsi, les consciences
pourront être transférées puis sauvegardées afin de rendre la
population immortelle. Mais de nombreux obstacles vont se dresser sur
leur chemin, à commencer par un réseau neuronal quantique encore
balbutiant. Si les évocations technologiques sont nombreuses, le
lecteur n’aura guère l’occasion de voir se
matérialiser une civilisation éprise de technosciences, l’auteur leur préférant les rives d’un monde
onirique peuplé de chimères, de métamorphes et de personnages
philosophant autour de la notion de liberté.
Nous
revenons donc près de la rivière, à la rencontre d’une femme aux
visages multiples appelée à effectuer des mues imaginales. Mais
qu’est-ce donc ? Y a-t-il un rapport, même lointain, avec le
concept psychanalytique jungien d’imago ? Ou s’agit-il d’une expression
appliquée en biologie ? Nous n’en dirons pas plus, au risque
de trop en dévoiler. D’un chapitre à l’autre, l’auteur
multiplie les techniques graphiques et les allers-retours entre deux
mondes, l’un proche d’être submergé quand l’autre est encore
en gestation.
Le
récit de Joseph Callioni est constellé de
références et si vous ouvrez l’œil, vous trouverez
notamment au détour d’une page un hommage aux Tournesols
de Van Gogh. Quant à Venera, ce nom évoque la
coquille Saint-Jacques, symbole des pèlerins partis sur les routes
de Saint-Jacques de Compostelle. C’est aussi un programme spatial
soviétique exploratoire sur la planète Vénus – Venera en russe –
déployé sur les deux décennies 1960 et 1970. Quoi qu’il en soit,
nous demeurons ancrés de part et d’autre dans l’univers du
voyage. Un voyage post-apocalyptique aux confins du rêve et de
l’étrange qui ne manque pas de singularité.
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Les commentaires postés sur ce site feront l'objet d'une modération avant publication.